Il faut relancer l’endoscopie digestive en République Démocratique du Congo It is necessary to restart the digestive endoscopy in Democratic Republic of Congo

Pendant ces deux dernières années, j’ai effectué, tous les trois mois, un séjour de 15 jours à Kinshasa, belle capitale de notre République Démocratique du Congo. Des séjours, totalement à mes frais, qui m’ont permis d’offrir des prestations bénévoles dans différents centres hospitaliers notamment les cliniques universitaires de Kinshasa et l’hôpital Saint-Joseph. Je me suis très vite rendu compte de la carence en hépato gastroentérologie, en ce qui concerne les ressources humaines et les équipements endoscopiques.
Une enquête en 2013 a permis de compter 14 hépato gastroentérologues exerçant en RDC, soit 1 pour 4 millions d’habitants, (contre, par exemple, 1 pour 14000 habitants en France).

Quatre seulement ont une activité endoscopique, par ailleurs limitée. L’endoscopie interventionnelle est limitée par de rares ligatures de varices oesophagiennes. Aucun ne pratique de polypectomie, d’injections sclérosantes, d’echoendoscopie, de sphinctérotomie biliaire endoscopique, etc. Pourtant, les pathologies digestives, biliaires et pancréatiques sont fréquentes : des tableaux d’ictère fébrile ou non, d’hémorragies digestives, de douleurs abdominales, etc. sont quotidiens dans des services des urgences. La pathologie cancéreuse, notamment digestive, est en augmentation constante dans le monde et en RDC.

En 2008, plus de 40% des décès en RDC avaient un lien direct ou indirect avec un cancer selon un rapport du ministère de la santé. Et l’endoscopie est devenue incontournable pour la prise en charge de ces pathologies. L’unité d’endoscopie digestive des cliniques universitaires ne fonctionne plus depuis de nombreuses années ; les rares jeunes diplômés n’ont donc quasiment aucune formation en endoscopie. Les conséquences sont évidentes : une prise en charge limitée de nos compatriotes présentant des pathologies digestives, expliquant sans doute une mortalité très élevée dans ce domaine.

Une décompensation oedemato-ascitique sur cirrhose, un petit nodule d’hépato carcinome sur cirrhose, un cancer colique, un cancer gastrique,… sont autant des causes de décès précoces, alors que des traitements sont possibles et disponibles. Ceci contribue sans doute à une espérance de vie des congolais (51ans) très faible, inférieure à la moyenne africaine (56 ans), loin derrière les moyennes Françaises (78 ans pour l’homme et 83
ans pour la femme). Pour remédier à cette situation, il faut : 1) il y a urgence à relancer la formation théorique et pratique en endoscopie digestive ; 2) re-équiper d’abord l’unité d’endoscopie des CUK, puis installer au moins une unité d’endoscopies digestives dans chaque hôpital de référence, province par province ; 3) promouvoir un maillage progressif du territoire, et créer des filières des soins avec niveaux de compétence. C’est dans cette dynamique que j’ai proposé en 2014 (et cela a été accepté et mis en place aux CUK) un cours post-graduate d’endoscopie Ann. AAnfrn. .M Aefrd.. ,M Veodl..,8 ,V Nol°.2 8, ,M Na°r 2s ,2 M01a5r s. 2015 11992233 digestive.

Dix-huit jeunes assistants ont participés aux cours théoriques et pratiques, et 6, très assidus, continuent leur formation pratique à mes côtés, en espérant qu’ils deviennent opérationnels dans quelques mois. Deux parmi eux vont passer une année de perfectionnement en France, et permettront de relancer des filières presque orphelines chez nous telles l’oncologie digestive, la proctologie médicale, l’hépatologie, la gastroentérologie pédiatrique, etc. Les quelques deux-cents patients que nous avons pris en charge pendant ces deux dernières années nous ont convaincu, s’il en était encore besoin, de l’utilité de notre démarche. L’union et la détermination de toutes les forces vives devraient nous permettre de relever le défi.