Chapitre 5: Urgences en chirurgie de la main
Prise en charge des urgences, de l’organisation en France avec la FESUM, Organisation des SOS Main*
Roux JL1.
1 Institut Montpelliérain de la Main. E-mail : jlroux07@free.fr
La Société Française de Chirurgie de la Main a été fondée en 1963, très rapidement ses membres ont pris conscience de l’importance de la prise en charge des urgences de la main et de leur organisation.
Dès 1966 Raymond Vilain crée le premier SOS main à Paris mais c’est en 1979 que les nancéens Guy Foucher et Michel Merle ont l’idée d’une Confédération Européenne des Services d’Urgences de la Main (CESUM). En 1989, sous la présidence d’Yves Allieu la CESUM devint la Fédération Européenne des Services d’Urgences de la Main (FESUM).
Depuis le début, cette association a été le moteur de l’organisation de la prise en charge des urgences de la main en France. Ce sont aujourd’hui 59 centres SOS main (36 privés et 23 publics) qui quadrillent le territoire national. Ces centres sont homologués par la FESUM selon des critères précis, ils doivent répondre à des normes en terme humain et matériel. Les chirurgiens doivent être correctement formés (en chirurgie de la main et en microchirurgie), en nombre suffisant (au moins 3 chirurgiens pour un centre agréé) afin d’assurer les urgences 24h/24h et 7j/7. Les chirurgiens doivent être membre de la SFCM et l’un des membres doit être membre titulaire.
Les locaux des SOS main doivent être adaptés en termes d’accueil et de traitement des urgences, le bloc opératoire doit disposer d’un microscope opératoire et de matériel microchirurgical. Le centre doit disposer de plusieurs zones : surveillance post-interventionnelle, hospitali-sation courte ou prolongée, chirurgie ambulatoire, rééducation spécialisée (kinésithé-rapeutes spécialisés), réalisation d’appareillages spécialisés.
La FESUM organise le contrôle régulier des centres (tous les 3 ans), organise des rencontres annuelles, contribue à l’enseignement, la recherche et la prévention. En 2010-2011 une campagne de prévention des accidents de la main a été menée partout en France.
Enfin il existe un numéro vert qui donne directement accès aux centres agréés.
En 1998, Guy Raimbeau a fait un bilan de la prise en charge des urgences de la main en France. Ce rapport a été publié dans un livre blanc. En 2018, nous avons pour ambition avec l’actuel secrétaire de la FESUM, Adil Trabelsi, de faire un nouveau bilan, ce bilan devrait être présenté lors du congrès de décembre 2018.
Réimplantation transcarpienne de la main : à propos d’un cas rare
Djondo Amisi J1, Ghabri R1, Omari N1, Allali Y1, Sangare F1, Nabih M1, El Andaloussi Y1, Haddoun AR1, Bennouna D1, Fadili M1.
1 Service de chirurgie orthopédique et traumatologique, Aile IV, Chu Ibn Rochd, Casablanca, Maroc
Introduction. La main est un organe noble, capable d’exécuter d’innombrables actions indispensables à la vie quotidienne grâce à sa fonction essentielle : la préhension.
Les amputations totales de la main sont les formes les plus graves des plaies de la main, nécessitant une prise en charge chirurgicale multidisciplinaire mesurée, d’indication réfléchie, et une réinsertion socioprofessionnelle précoce.
Matériel et méthodes. Nous rapportons l’observation d’un patient âgé de 40 ans, droitier, victime d’une agression par arme blanche (coup de sabre) occasionnant une amputation de la main gauche pour laquelle il a été référé au CHU Ibn Rochd de Casablanca pour une prise en charge spécialisée par l’équipe de garde.
Résultats. Toutes les structures osseuses, tendineuses et vasculaires étaient sectionnées. Après la préparation rapide des malades par l’équipe de réanimation et d’anesthésie, l’équipe chirurgicale a procédé aux différents temps de la réimplantation. Le premier temps a été le repérage de toutes les structures lésées avec parage. Puis, un brochage radio carpien, la réparation a consisté en la suture des deux artères (radiale et ulnaire). A la fin de l’intervention, la main était chaude et les suites postopératoires étaient simples.
Conclusion. Ces actes de réimplantations ont permis de conserver les schémas corporels du patient, et les résultats fonctionnels obtenus sont supérieurs à celui de la prothèse. Le malade a été revu deux ans après, la main était toujours vivante et le patient bougeait ses doigts grâce aux muscles extrinsèques.
Organisation des urgences au Centre de Chirurgie de la Main et de Paralysies de Douala
Tiemdjo H1.
1 Centre de Chirurgie de la Main et de Paralysies de Douala, Douala, Cameroun
Devant l’ignorance de l’existence de la chirurgie de la main par la majorité de la population ainsi que du corps médical, il est rapidement apparu nécessaire de créer une structure entièrement dédiée à elle, le Centre de Chirurgie de la Main et des Paralysies de Douala est donc né en 2013 : premier et unique centre de chirurgie de la main – SOS Main du Cameroun.
L’équipe du SOS Main Douala est une équipe serrée autour du chirurgien de la main composé de 5 infirmières, 3 infirmiers anesthésistes vacataires, 2 kinésithérapeutes et une secrétaire.
A SOS Main Douala, les urgences main sont prises en charge immédiatement dès que toutes les conditions sont réunies et le mode ambulatoire est privilégié. La présence d’un rééducateur de la main permet d’assurer le principe du « TTMP » (Tout en un Temps et Mobilisation Précoce) cher au chirurgien du centre. Sur le plan anesthésique l’ALR est réalisé autant que possible, le chirurgien maitrisant cette technique. Le nombre d’interventions chirur-gicales en urgence est passé de 15 en 2013 année d’ouverture du centre à 36 en 2016 avec plusieurs revascularisations chaque année, les urgences non chirurgicales de la main ont triplées durant cette période. Les difficultés et limites sont représentées par le manque de moyens financiers qui des fois empêche la prise en charge ou la réalisation des 2e ou 3e temps opératoire, un personnel anesthésique maitrisant les techniques d’ALR, la nécessité à court terme d’avoir un second chirurgien.
En conclusion, l’organisation des urgences main mise en place au Centre de Chirurgie de la Main et des Paralysies de Douala permet de prendre en charge efficacement toutes les urgences de la main et du membre supérieur. Le manque de moyens financiers des patients est une difficulté avec laquelle l’équipe est régulièrement confrontée et doit composer. L’arrivée d’un second chirurgien de la main est une nécessité à moyen terme au risque de compromettre la pérennité du pole SOS Main du Centre de Chirurgie de la Main et des Paralysies de Douala.
Mots clés : urgences main, SOS Main, Douala, Cameroun
Traumatismes de la main chez l’enfant : accident par moulin à foufou
Ondima IPL1, Koutaba E1, Massamba Miabaou D1, Mboutol-Mandavo C1, Mieret C1, Bachir A1, Ossete G1.
1 Centre Hospitalier Universitaire de Brazzaville, République du Congo
L’enfant, est volontiers exposé aux accidents domestiques, ludiques, sportifs et de la voie publique. Les accidents par moulin à Foufou bien que rares sont pourvoyeurs de traumatismes complexes et graves de la main associant des lésions cutanées, vasculaires, tendineuses et ostéo-articulaires. Leur prise en charge doit se faire de l’urgence à l’appareillage.
Les auteurs rapportent une série de 10 cas victimes d’un traumatisme grave de la main par accident de moulin à Foufou. Ces patients dont 9 garçons pour 1 fille étaient tous âgé de 10- 16 ans. La prise en charge en urgence a consisté en une réparation autant que possible des différentes lésions sauf dans les cas ayant nécessité une amputation ou régularisation du moignon. L’appareillage a été pris en charge par une association caritative. Les résultats fonctionnels et esthétiques à long terme ont été acceptables.
Mots clés : Traumatismes, main, enfant, accident, moulin, foufou
Evaluation du traitement des mutilations de la main en situation sanitaire précaire au CHU de Treichville
Kossoko H1, Djè Bi Djè Assi V1, Allah CK1, Yéo S1, Dietlin GC1.
1 Service de chirurgie plastique reconstructrice et esthétique, chirurgie de la main et Brûlologie au CHU de Treichville, 01 BP V 3 Abidjan 01, Côte-d’Ivoire
Introduction. Les mutilations graves de la main sont très fréquentes en milieu africain. Les auteurs rapportent les résultats de la prise en charge de mutilations graves de la main et en évaluent les résultats en fonction des conditions d’exercice.
Patients et méthodes. Une étude rétrospective de 55 mutilations graves de la main a été réalisée chez 52 patients entre juin 2002 et juin 2016. Ont été inclues Les lésions traumatiques par accidents du travail, accident de la voie publique, et par blast.
Résultats. Quarante-cinq hommes (86,5%) et sept femmes (15,5%), dont 46 adultes (88,5%) et six enfants (11,5%) ont été opérés. L’âge moyen était de 26,8 ans, avec les extrêmes de 12 ans et 56 ans. Cinquante-cinq mains ont été traitées dont 33 mains droites (60%) et 22 mains gauches (40%). Dix-huit patients (34,6%) ont été opérés en temps de guerre et 34 patients (65,4%) en temps de paix. La lésion était unilatérale dans 49 cas (89,1%) et bilatérale chez trois patients (10,9%). Les accidents du travail (26,9%), les lésions par blast (57,7%°) et les accidents de la voie publique (15,4%) étaient incriminés. Le délai moyen de la prise en charge était de cinq jours. Le traitement concernait les amputations partielle et totale de doigts, les écrasements et broiements de mains. Les indications étaient fonction du niveau lésionnel, du niveau d’amputation et de la main controlatérale. Les gestes réalisés étaient des régularisations, des amputations, des embrochages, des réparations tendineuses. La greffe osseuse, la revascula-risation par des techniques microchirurgicales, et le fixateur externe de la main n’ont pas été réalisés. Le lambeau inguinal de Mac Gregor a servi dans la couverture cutanée dans 13 cas (23,6%). Les complications étaient des lâchages de suture, le sepsis, et les nécroses tissulaires. Les reprises chirurgicales secondaires étaient difficiles et retardées. La mortalité opératoire a été nulle.
Discussion. La problématique de la prise en charge des mutilations de la main reste entière dans nos pays en développement. Le traitement primaire est insuffisant et l’adaptation du patient reste difficile. A terme, les mains sont séquellaires, avec un, deux ou trois doigts qui sont raides, inutiles et très peu utilisées.
Conclusion. L’environnement de travail reste difficile voire précaire chez nous dans nos centres hospitaliers. En urgence, la chirurgie de sauvetage de la main est difficile du fait de la précarité des structures de soins. En plus d’un plateau technique inexistant. De plus, la prise en charge des patients est retardée, leurs parents étant livrés à eux-mêmes sans moyens financiers. Les fracas complexes des mains conduisent à des amputations radicales. La chirurgie secondaire est indispensable mais plus rare voire difficile à réaliser.
Mots-clés: mutilation, main, doigt, précarité, amputation
Prise en charge des urgences de la main au Sénégal : Activités de l’Hôpital A Le Dantec
Coulibaly NF1, EK fall M1, Dembele B1, Diagne MB1, Dia R1, Gueye AB1, Ndiaye A1, Dieme C1.
1 Service d’orthopédie traumatologie CHU Le DANTEC Dakar, Sénégal
La chirurgie de la main connaît un essor au Sénégal depuis les années 2000 malgré le déficit de chirurgiens spécialisées dans cette discipline. Les lésions retrouvées en urgence varient en fonction des localités. La région de Dakar contient 21% de la population du Sénégal ; 68% des orthopédistes et 100% des chirurgiens de la main y sont retrouvés.
De janvier 2016 à décembre 2016, 3840 patients ont été pris en charge au service des urgences chirurgicales d’orthopédie-traumatologie de l’hôpital A Le Dantec. Les femmes en représentaient 61%. L’âge moyen était de 37,5 (extrêmes13 et 81 ans).
Les traumatismes du membre supérieur concernaient 44,4% des patients et intéressaient l’épaule, le bras, le coude, l’avant-bras, le poignet et la main.
Parmi les traumatismes du membre supérieur, le poignet et la main étaient concernés dans 17,39% des cas et les lésions rencontrées étaient les suivantes : _ traumatismes ouverts : 35,71% ; traumatismes fermés : 33,72% ; les infections (panaris et phlegmons) : 28,57% ; autres : corps étrangers, brûlures et traumatismes négligés
Dix (10%) des traumatismes ouverts étaient des traumatismes graves : main de toupie, amputation traumatiques. Dans 4,9% des cas, ils étaient associés à d’autres lésions le cadre d‘un polytraumatisme. Le traitement a été chirurgical pour toutes les lésions ouvertes et consistait à un parage avec stabilisation du squelette, réparation tendino-nerveuse et vasculaire ; la replantation a été faite dans 5 cas et une revascularisation dans 2 cas. Pour les traumatismes fermés, le traitement était orthopédique dans 78% des cas. Les infections étaient traitées par excision (panaris), drainage de collection et ou lavage de gaine (phlegmons).
le développement de la chirurgie de la main au Sénégal nécessite la constitution d’une équipe motivée avec des moyens adéquats pour permettre une meilleure prise en charge des patients et une formation plus élargie de praticiens.
Mots clés : chirurgie, main, Sénégal, traumatismes, urgence
Prévention des accidents au niveau de la main (avant et après)
Moutet F1,2, Pernot P², Finet E², Corcella D1, Forli A1, Chedal-Bornu B1, Bouyer M1.
1 SOS Main Grenoble, France
2 Association Prévention Main, Grenoble France
Forts de leur expérience d’un réseau ‘‘Prévention Main Rhône Alpes Auvergne’’, les auteurs veulent tenir la gageuse de parler ici de la prévention des accidents de la main en Afrique. Les conditions y sont bien sûr le plus souvent différentes mais le principe reste le même : il faut connaitre ce que l’on veut protéger.
En France on compte1.5 million d’accidents de la main par an, pour une population de 67 millions d’habitants, soit un accident toutes les 20 secondes. 1/3 surviennent au travail et 2/3 lors d’activités domestiques. Les conséquences en sont souvent lourdes (première cause d’accident avec arrêt de travail). Que dire d’un continent où la survie dépend de l’habilité de ses mains pour plus de ¾ de la population ?
Il faut donc prévenir l’accident et si l’accident survient le gérer au mieux pour en prévenir les complications immédiates. Pour ce faire les auteurs proposent, pour un public non averti, des comparaisons et un modèle d’explications simples sans être simplistes et synthétiques sans être fausses. Les auteurs exposent les risques les plus fréquents et comment tenter de s’en prémunir. Elle montre les accidents les plus courant et la prise en charge souhaitable quelques soient les conditions ‘‘locales’’. Tout est bien évidemment à transposer mais c’est l’ignorance qui fait les résignés.
Certes les EPI (Equipements de Protection individuelle) sont une aide fondamentale (gants), mais il faut aller vers le CPI (Comportement de Protection individuel) si l’on veut réellement être efficace (travailler sans bagues aux doigts, respecter les protections des machines-outils etc.). C’est vers ce nécessaire changement des pratiques du quotidien que veut pousser notre modeste contribution.
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